Le cadeau de Raymond ou ce que je t’offre, je me l’offre.

Pendant longtemps cet homme m’agaçait par ses hésitations et son excès de délicatesse, il s’excusait de prendre trop de place, avait peur de déranger. Et malgré moi, j’essayais de l’aider, de trouver avec lui des solutions. Ce qui ne faisait que l’enfoncer d’avantage dans sa confusion et m’agaçait encore plus.
Je lui renvoyais en toute inconscience le message sous-jacent: tu es trop con pour savoir t’en sortir alors je vais t’aider. Sans le vouloir je lui mettais encore la pression alors que mon intention était qu’il avance. Cette intention thérapeutique a valeur d’exigence et bloque encore davantage tous mouvements de vie libérateurs. Elle est une pression réelle qui bloque.
Je ne voyais pas à quel point chacune de mes interventions, mes bonnes intentions de thérapeute renforçait sa croyance << je suis nul! >>
A notre dernière rencontre j’ai pû lâcher ce qu’il active chez moi. J’ai accepté que ce qui m’agace chez lui c’est exactement ce qui m’agaçait et m’agace encore chez tout le monde car c’est ce qui est encore un peu, mais de moins en moins, difficile à accepter de moi.
Je n’aime pas me voir hésiter et « quequeiller », tourner en rond et prendre la plus mauvaise décision, celle qui m’enfonce encore davantage. Je m’agace moi-même et Raymond est un impitoyable miroir de ça.

Cette fois je l’ai vu en face de moi. Je l’ai accueilli complètement, je l’ai écouté. J’ai été ému de voir cet enfant intérieur apeuré, j’ai reçu ses peurs. Et plus je l’accueillais, plus il s’ouvrait. Peu à peu j’ai vu son être, senti sa puissance. Il s’est apaisé enfin, sa voix a changé, il a tout accueilli de lui sans changer 1 mm et sans intention de le faire et tout s’est ouvert.
3 jours après, il m’a téléphoné pour me faire part des décisions qu’il a prises avec beaucoup de fermeté et de détermination.

Je lui ai offert ma reconnaissance et mon amour sans condition et sans attente, c’est la seule chose qui pouvait être bonne pour lui. Il s’est senti accueilli vraiment et reçu comme il est jusque dans l’irrecevable. A partir de ce point-là en s’acceptant lui-même, son énergie de vie s’est libérée et a libéré quelque chose en lui.

Mais ce que je lui ai offert, c’est à moi que je l’ai offert. Dans de nombreux textes sacrés il est écrit: << ce que tu fais à l’autre c’est à toi que tu le fais! >>
J’ai reconnu cet enfant vulnérable, apeuré et hésitant et c’est le mien que j’ai enfin accueilli. J’ai vécu une formidable transformation. En t’accueillant dans le non-reçu de toi, je me suis accueilli dans le non-reçu de moi.
Merci Raymond, merci Jean-Charles !
Est-ce que j’ose être payé pour ça ? …………rires !!!!!!!

Le Toucher vivant

C’est une attitude intérieure du toucheur qui accepte de ressentir la vie en lui. Il en accepte les mouvements, qu’ils soient agréables ou désagréables. Il a le courage et la noblesse d’être avec tout ce qui se passe en lui. Il reconnaît pleinement les sensations venant du mouvement de vie comme lui appartenant. Il en prend l’entière responsabilité.

C’est souvent facile de se protéger en disant: << Je sens que tu as peur! >> alors que cette peur est entièrement le ressenti du toucheur, elle lui appartient.
Ces sensations sont liées à l’organisation de la vie et à son mouvement à l’intérieur de lui. Tout ce que ressent le toucheur dans ce contact lui appartient. L’interpréter comme étant ce que vit l’autre est non seulement une aberration mais une manière de prendre le pouvoir (je sais ce qui se passe en toi). Ce n’est plus être vivant avec l’autre. Cette attitude fréquente remet dans l’égo et le mental, elle bloque tout mouvement de vie en profondeur.

Les attitudes telles que : << je veux t’aider, je suis le thérapeute qui sait ce qui est bon pour toi, je connais une merveilleuse technique qui peut résoudre ton problème, je suis déjà passé par là ! >> sont autant de pièges qui, même si elles partent de bonnes intentions, génèrent une énergie qui s’oppose à la pulsation de l’énergie de vie originelle.
Toutes les théories visant à comprendre l’être humain sont structurées autour et par les blessures de leurs auteurs. (Je n’échappe pas à la règle, ce que j’écris est aussi relié à mes blessures). Tous les projets, techniques ou analyses et résolutions qui en découlent créent des blocages et peuvent mener à l’impasse en ayant l’impression d’avoir fait un bon travail si l’on a pas la conscience de cette réalité. Ce faisant l’individu reste sous contrôle. Tout changement souhaité, même s’il est proposé dans la non-directivité totale, dirige et limite. Il a valeur d’exigences et s’oppose au mouvement de vie.
Seule la vie sait, donne la direction, le mouvement, imprègne la sagesse du corps. Elle porte la connaissance et la structure de l’être, l’organisation spécifique de l’être qui est là. Si le toucheur thérapeute accueille la vie en lui et qui il est, il peut accueillir la vie chez l’autre quelle qu’en soit la manifestation.
L’intention pleine d’émotions, l’analyse et l’interprétation sont des formes de pouvoir très subtiles qui bloquent tout mouvement de vie. Elles répètent des attitudes connues lors de relations antérieures parents/enfants, professeur/élèves, autorité/peuple, maître/esclave, médecin/patient etc.

Le préconscient ou le non réalisé … le rien ?

C’est à dire tout un potentiel qui est déjà là, simplement dans cet instant il est juste perçu sous une forme incompréhensible. Des sensations physiques parfois désagréables et des douleurs. Le mental l’interprète comme un problème. C’est à cause de l’interprétation que la personne vit ces sensations comme désagréables.

Le potentiel est là, il n’a pas encore de forme, il n’est pas encore conscient. il n’est pas encore réalisé et réalisable. Si L’être vit cet état avec conscience, il peut accepter les douleurs liées à ce processus ainsi que les émotions associées.
Souvent les douleurs sont liées à une énergie qui cherche son chemin dans un corps non préparé. Si la personne le vit en maladie, par exemple si j’ai mal au ventre c’est à cause de ce que j’ai mangé hier soir, elle ferme la porte à un processus d’évolution.
La difficulté c’est de ressentir en conscience, d’accepter la vie, la vie et la conscience du préconscient et du non réalisé. Une attitude intérieure inadéquate (inconsciente) fait passer à côté d’une résolution évolutive qui se passe toujours dans le corps.
L’arrivée du potentiel de création de quelque chose dans ce plan passe par le corps. Elle ne peut pas entrer par le mental même si la prise de conscience touchera aussi le mental.
Toute création est une énergie qui vient de l’espace de création universelle. Elle touche l’entier de l’être, mais son point d’ancrage et d’apparition est le corps. Sa matérialisation est bien sûr le corps. L’émotion du projet et la certitude de justesse jaillissent dans ce plan par le corps. Les mots, les formes, les sons, les idées, les concepts seront exprimés par le corps.

Accompagner la tension

Si le thérapeute touche une sphère de tension et qu’il se relie à cette sphère il en devient le prolongement. Il en perçoit la vibration, l’ambiance, la couleur, le mouvement ou le non-mouvement, etc. Tout ce qui se passe en lui est en rapport avec lui-même en relation avec cette tension.
S’il accepte son vécu complètement, sa manière d’être en vie dans cette relation, manière dont la vie est organisée en lui à l’occasion de l’autre avec cette tension. Alors le prolongement vivant qu’il accepte d’être, participe à la résolution du blocage par la vie elle même.
Il sait aussi accepter que rien ne bouge si l’organisation de vie entre eux et dans ce moment passe par cette vérité là.
Je remercie la vie de me mettre en présence de ce postulat.


Jean-Charles Aubert